Publié le 12 mars 2019 à 20h18 par Lisa Guyenne
Les particules fines, nouvel ennemi public numéro 1 : c’est la conclusion d’un rapport publié ce mardi par des chercheurs allemands et chypriotes. Ils estiment à 8,8 millions le nombre de morts à cause de la pollution en 2015 dans le monde. C’est deux fois plus que la précédente estimation.
8,8 millions de morts, contre sept millions à cause du tabac. Avec cette nouvelle estimation, le nombre de décès liés à la pollution atmosphérique dépasse désormais celui des morts liés à la cigarette. Quelles pathologies exactement ? Avec quelles pistes d’amélioration ? Le docteur Gilles Dixsaut, président du comité national contre les maladies respiratoires, et président de la Fondation du souffle en Île-de-France, répond à nos questions.
FRANCE INTER : Selon le rapport, la pollution est responsable de 8,8 millions de décès dans le monde, dont 790 000 décès en Europe, et 67 000 rien qu’en France. C’est près du double de la précédente estimation, qui s’élevait à 4,5 millions de morts. Comment sont mesurés ces chiffres ?
Gilles Dixsaut : En épidémiologie, on ne peut pas dire qu’une pathologie est liée à un facteur précis : on attribue à chaque facteur (tabac, pollution…) une part du risque. Dans cette étude, les chercheurs utilisent davantage de marqueurs. Plus vous étudiez de marqueurs polluants, plus vous avez des risques élevés. L’étude a été réalisé avec davantage de finesse qu’auparavant, c’est-à-dire qu’on ne parle pas de la pollution comme un seul facteur, mais comme un grand nombre de facteurs qui viennent s’ajouter, et quelques fois se multiplier.
FRANCE INTER : Le seuil limite de tolérance aux particules fines en Europe est actuellement 2,5 fois supérieur que les standards fixés par l’OMS. Faut-il abaisser ce seuil, comme le recommandent les chercheurs de l’étude ?
Gilles Dixsaut : Oui, ce seuil est encore beaucoup trop élevé en Europe. De plus, on continue à mesurer des polluants anciens, grossiers, qui sont moins en moins présents. Autrefois, les polluants, c’était le charbon, les locomotives à vapeur, les diesels qui fumaient. Les évolutions techniques ont fait que les particules sont devenues de plus en plus fines.
Aujourd’hui, il s’agit de particules ultra-fines. En milieu urbain, les particules proviennent du trafic, mais aussi de certains polluants, comme le dioxyde d’azote combiné à l’ammoniaque, qui vient par exemple de l’agriculture ainsi que de certains véhicules. Il est donc évident que, si l’on veut être efficace, il est clair qu’il faut se fonder sur les polluants actuels, et pas ceux qu’il y a cinquante ans, tout en adoptant les valeurs limites recommandées par l’OMS.
FRANCE INTER : Aujourd’hui, quels types de pathologies liées à la pollution de l’air observe-t-on ?
Gilles Dixsaut :Les pathologies sont de plus en plus diverses. Au départ, ce sont les pathologies respiratoires : bronchopathies chroniques obstructives, cancers pulmonaires, déclenchement ou aggravation des asthmes. Mais ce sont aussi désormais des maladies cardio-vasculaires, parce que les particules ultra-fines vont passer dans la circulation sanguine et se fixer sur les parois artérielle, entraînant thromboses, AVC, infarctus… Ce sont également des maladies endocriniennes telles que le diabète.
On parle aussi de plus en plus de maladies neurodégénératives, comme Alzheimer, et même des pathologies qui touchent les sportifs qui s’exercent à proximité des autoroutes. On observe également des retards de développement fœtal et d’accouchements prématurés, parce que les particules qui passent dans la circulation sanguine arrivent dans le placenta et se retrouvent chez le fœtus. Le champ s’élargit progressivement à mesure que l’on étudie les formes de pollution les plus récentes
Lien vers l’article de France Inter ici